lundi 9 avril 2018

Roses ... Fornells ... Soller ...

J'avais choisi ce mouillage (cala Conca) parce qu'il était situé côté sud de Cadaques, me disant qu'ainsi je serais protégé du flux de sud prévu ces jours-ci. 
Le flux de sud était finalement orienté plutôt sud-est, exposant la cala au vent, et est venue s'y ajouter une forte houle d'est qui rendait le mouillage fort désagréable, et limite dangereux avec des vagues d'un mètre alors que j'étais mouillé dans trois mètres d'eau. Tout cela m'a décidé à changer de coin plus vite que prévu, c'est ainsi que j'ai quitté Cadaques mardi 3 avril au matin, avec difficulté car c'est loin d'être une sinécure que d'avoir à remonter un mouillage à la main dans les conditions que j'ai précisées plus haut.
Toutes les calanques au sud de Cadaques étant exposées elles aussi au sud est, j'ai fini par porter mon choix sur Santa Margarida, que je connaissais un peu pour m'y être arrêté deux mois plus tôt, et je suis allé me poser à la sauvage le long d'un quai, guidé à mon arrivée par Pierrot, un des squatteurs du coin, qui vit là sur son bateau-appartement depuis 17 ans, et ne se déplace jamais, quelle que soit l'heure, sans sa brique de vin de la même couleur que ses joues ...
Tiens, je suis déjà venu ici !

Squatt maritime à Sta Margarida

On est déjà le 3 avril, et Nadiège qui doit arriver dans une semaine à Palma de Majorque, et la météo qui ne laisse pas beaucoup de fenêtres en ce moment pour descendre vers le sud ! Il semble y avoir quand même une possibilité intéressante en partant le lendemain soir, avec le flux de sud est qui doit s'inverser pour laisser la place à du nord ouest, qui tournera vite au nord est puis à l'est. Ça vous parle peu-être pas beaucoup, cette succession de points cardinaux, alors pour être concret disons qu'il ne faudra pas trop traîner, et que je devrais partir avec des vents portants (dans le dos) qui s'orienteront progressivement sur le côté pour finir presque de face, car ma prochaine étape c'est Fornells, une anse très bien abritée sur la côte nord de l'île de Minorque. 
140M à parcourir, et je pars comme prévu en fin d'après-midi ... mais avec le vent dans le nez au lieu de l'avoir dans le dos ! Ça va durer jusque vers 21 heures, puis le vent tombe complètement, me forçant à mettre le moteur en route, car il faut absolument que je respecte mon timing si je ne veux pas me retrouver contre le vent pour mon arrivée sur Minorque.
Les îles Mèdes au couchant

Le moteur ronronne toute la nuit (je ne le pousse pas et ma vitesse au moteur est en général de 4 à 4,5 nds), ça n'est pas trop désagréable car la mer qui m'avait bien secoué en partant s'est maintenant calmée, et je passe cette nuit à dormir, pas plus de 15 à 20 minutes à la fois bien sûr, surtout qu'il y a pas mal de bateaux, de gros bateaux, qui croisent dans le même secteur que moi.
7h15 le lendemain matin, le vent se relève enfin pour souffler du nord-nord-ouest, gonflant les voiles d'Hiva Oa qui marche à 7-8 nds de moyenne. Comme prévu le vent tourne du côté est au cours de la journée et j'arrive à Fornells un peu avant la tombée du jour. Je pose la pioche, je me fais une tortilla vite fait (on est en Espagne ou pas ?) et au lit, car je suis fatigué et j'ai prévu de repartir dès le lendemain matin pour le port de Soller, le seul abri de toute la côte nord-ouest de Majorque.

J'ai 70M à faire pour rallier Soller et je quitte Fornells ce vendredi matin sous le soleil et un vent de sud est très modéré qui devrait monter pour atteindre 20nds (une bonne brise) dans le courant de la journée ... Heureusement que je ne suis pas superstitieux, car comme tout le monde le sait, on ne largue jamais les amarres un vendredi !
La navigation est vraiment tranquille jusqu'aux caps Nati et Bajoli, les deux caps marquant la pointe ouest de Minorque, même avec un bon vent je n'arriverai pas à Soller avant la nuit. Tant pis, même si je ne connais pas le lieu la baie de Soller ne présente pas de difficulté, et c'est un abri tous temps, je ne me fais pas de soucis.
Une fois dans le canal de Minorque, entre les deux îles, le vent monte franchement pour pousser Hiva Oa qui cavale à 8-10 nds, parfois un peu plus, un vrai régal !
C'est derrière le cap Formentor que les choses vont se gâter, démontrant une fois de plus qu'il ne faut pas se moquer des dictons marins ! C'est décidé, à partir de maintenant je ne sifflerai plus pour appeler le vent, le pâté de l'animal aux grandes oreilles sera interdit sur mon bateau, ainsi que les femmes et les curés ! Désolé Nadiège mais pour ton arrivée à Palma on va louer un airbnb ! Nan je déconne, quand même pas .... quoique !
La météo que j'ai bien sûr consultée avant de partir me laissait le choix, en arrivant sur Majorque, entre rester à quelques milles au large, avec un vent que je pourrais ressentir légèrement de face (légèrement hein), ou longer les falaises, tout près, avec des vents très faibles  mais très irréguliers en direction. Je choisis cette dernière option, me disant que s'il faut je m'aiderai un peu du moteur pour les derniers milles ... Ben ça s'est pas passé vraiment comme ça !
Car à peine passé le cap Formentor, la pointe nord de Majorque, le vent se met à varier, et à chaque fois en quelques secondes, de 0 nds à 35 nds. Je mets alors le moteur en route et je remarque que l'aiguille du voltmètre ne monte pas, merde, l'alternateur ne charge pas, encore un truc qu'il va falloir voir. Et puis quelques minutes plus tard le régime moteur se met à baisser, puis il cale complètement. Là ça commence à m'embêter un peu car je suis tout proche des falaises de Majorque, et il ne faudrait pas qu'un manque de vent associé à un mauvais courant pousse le bateau du mauvais côté. J'ai pas trop le temps d'y réfléchir :  d'un seul coup la mer se met à fumer, le vent siffle et mugit, s'engouffre sous le flotteur bâbord et soulève mon annexe qui s'envole et vient taper contre la bôme, y laissant au passage un joli petit trou. L'adrénaline monte vite dans ces cas-là, et je me bats pendant un moment pour tenter de remettre le zodiac à plat et l'assurer solidement afin qu'il ne s'envole pas à nouveau. Ce coup de vent ne dure pas longtemps, et je vois à l'état de la mer qu'il est très localisé (moins de 500m le large) mais je ne me souviens pas avoir déjà vu en mer un phénomène d'une telle violence, et j'estime la vitesse du vent à ce moment-là (ce n'est qu'une estimation car avec l'alternateur ne chargeant plus j'avais éteint mes instruments électroniques pour économiser l'électricité) à nettement plus de 50nds, peut-être 60 à 70, j'avais du mal à rester debout, et ne pouvais bouger l'annexe au plus fort du phénomène. 
Voilà ce que c'est que de partir un vendredi ! L'histoire se termine quand même bien, comme d'habitude, puisque je ne sais comment, un peu plus tard le moteur consent à démarrer à nouveau, et je finis par atteindre le port de Soller vers une heure du matin.
Au mouillage au port de Soller


Le tram qui joint le village au port

Pour finir sur une note joyeuse, et contrastant avec la violence des éléments lors de cette partie du voyage, j'ai trouvé sur ce coin de Majorque un petit morceau de paradis, des orangers et des citronniers à perte de vue, et des figuiers, et des palmiers, et des amandiers, le tout au milieu d'un paysage montagneux, avec une odeur permanente de fleur d'oranger !
Des orangers à perte de vue



Viendez les gens, viendez voir par vous-mêmes si vous le pouvez, le spectacle vaut vraiment la peine.
Pour finir, et sans rapport avec tout ce que je viens d'écrire, je me dois de féliciter ma fille Nina, coachée par sa sœur Cloé, qui vient, hier dimanche, de participer et de terminer brillamment sa première course très longue, puisqu'il s'agit du marathon de Paris, bravo les deux grandes, l'une ironwoman, l'autre marathonienne, c'est quet'chose non ?
Triathlète à gauche, marathonienne à droite

Bravo championne !

3 commentaires:

  1. Hello,
    Vous allez vous régaler à cette saison, c'est très agréable en effet.
    Les "remolinos" du cabo Formentor sont bien connus... pas des williwaws, mais quand même ! La côte NW de Majorque, c'est une costa "brava", comme ils disent sur le continent...
    Tu aurais mieux fait de suivre mon petit conseil de t'arrêter à Pollensa... Nunky, s'il passe par là, pourrait te le confirmer. La baie est vaste, mais au nord du port, le mouillage est bien protégé, même de l'Est !
    Bonnes vacances !
    Flora

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  2. Ah oui, le morceau de paradis a l'air superbe ! ça fait envie

    Bonnes vacances
    Frédérique

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  3. Ola Eric,
    Je découvre avec du retard les récits de tes nouvelles escapades sur les flots !
    Bon ça a envoyé du costaud, et tu as tenu bon Man !
    Stay Rock et Zen !
    Christian

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