mercredi 6 décembre 2017

Sauts de puce ...

J'ai décidé de repartir dimanche 3 de Carino, mais tranquillement, pour deux raisons :
- le vent est tombé, donc terminé les bonnes moyennes journalières, et bienvenue aux alternances voile-moteur,
- et puis ce dégolfage m'a claqué, littéralement, je sens méchamment mes 57 ans, et je n'ai pas envie de me retaper tout de suite des nuits de veille !
Je vais donc procéder par petites étapes ...

La première étape me mènera de Carino à Arès, dans le golfe de la Corogne, la journée de dimanche. Un départ vers 9h30, dans le froid mais au soleil, une nav' au moteur car pas de vent du tout, jusqu'à 18h30, et mouillage, à l'ancre dans la baie d'Arès. Mise à l'eau du dinghy, petite balade sur le front de mer, deux cervezas et une petite salade dans un bar à écouter Eric Clapton avec Cream, et je rentre au bateau pour me mettre au lit, crevé de n'avoir rien foutu de toute ma journée.
On passe le cap Ortegal

Un petit en-cas ?
Ares au matin



La deuxième étape, lundi, me conduira à Laxe, environ 40M de distance, comme la veille, mais cette fois avec un peu de vent. Comme la veille j'arrive à Laxe vers 18h30, à la tombée de la nuit (le soleil se couche plus tard ici). Comme la veille, à peine l'ancre jetée je mets l'annexe à l'eau et vais faire un tour en ville, où je trouve un bar sympa, assez typique, peuplé uniquement d'hommes d'un âge certain (ils sont tous plus âgés que moi, chouette !) qui boivent du vin en grignotant quelques tapas et discutant fort. Ça me change, tout ce bruit, et ça me soûle un peu (à moins que ce ne soit la bière), moi qui prends des habitudes bizarres, à parler tout seul à voix haute quand je suis en mer, mais aussi dans la rue. Moment sympa dans ce bistrot, mais je ne rentre pas tard, faut que je sois en forme demain pour repartir.
Ambiance, ambiance !
Laxe


L'étape suivante, hier mardi 5 décembre, doit me conduire à Muxia, où j'ai décidé d'aller m'abriter d'un coup de sud qui doit débuter doucement mercredi pour forcir jeudi et atteindre 20 à 25 nœuds. 20 à 25 nœuds de vent c'est pas la tempête, mais quand le vent vient du sud et qu'on va vers le sud, mieux vaut faire une pause et attendre que ça tourne. Donc ce sera Muxia, un village bien abrité ... du vent du sud ! En plus, c'est pas loin, une quinzaine de milles, donc du gâteau !
C'est tellement du gâteau, avec un petit zef bien orienté et du soleil, qu'au bout de 10M je me décide à prolonger cette étape jusqu'à Muros, ça va la rallonger de 30M, mais il faut profiter des bonnes conditions, et puis chaque mille gagné me rapproche de mon but !
Ok y a du soleil, mais le vent est
un peu frisquet !

Je vais arriver à Muros vers 19h30, donc à la nuit bien tombée. Ça ne m'enchante jamais d'entrer dans un port inconnu de nuit, mais j'ai bien repéré les lieux sur mes cartes (électroniques) et sur google earth, faudra juste faire attention aux cailloux qui traînent avant l'entrée du port.
16h00 je double le cap Finisterre avec un serrement de gorge, le cap Finisterre, déjà par son nom, m'a toujours évoqué quelque chose de mystérieux, plein d'aventure à venir, c'est là où se finit la terre, et puis c'est là aussi où pour moi se termine officiellement la première partie de mon voyage, côté golfe de Gascogne. Maintenant, on se tourne vers le sud, du côté ibérico-lusitanien (bon, hispano-portugais ça marche aussi hein !) !
Au cap Finisterre : émotion !

18h00, le vent est totalement tombé, la mer est d'huile, le soleil est bas sur l'horizon et je vais mettre le clignotant à gauche vers Muros ... vers Muros, t'es sûr ? Regarde, de toutes façons quand tu vas arriver il fera nuit noire, et puis la mer est calme, le cap Finisterre t'a laissé passé sans que Neptune ou Éole ne manifestent le moindre mouvement d'humeur ... Et si on poussait un peu plus loin ?
Baiona n'est qu'à 40M de plus, en marchant tranquillement au moteur (le réservoir est plein) tu peux y être vers 3 heures du mat', regarde, t'as pas sommeil, t'as envie d'avancer, et ça pourrait franchement raccourcir la prochaine étape, peut-être vers Lisbonne.
Carte postale

Allez banco, on y va, direction Baiona, tout près de la frontière avec le Portugal.
Et ce sera une fin de nav' sans histoire, avec une arrivée à 2h45, et un plantage de pioche tranquille suivi d'un sommeil agité mais réparateur jusqu'à 8h30 ce matin !
Euh, une fin de nav' sans histoire si on fait abstraction de la petite aventure qui m'est arrivée aux alentours de minuit.

La nuit il faut faire la veille (comme le jour d'ailleurs) afin d'éviter tout accrochage avec un autre navire. Mais y a pas besoin de regarder la route tout le temps comme en voiture. Donc on jette un œil circulaire pour vérifier que l'horizon est clair, et puis on rentre vite à l'intérieur parce qu'on est en décembre et qu'on se les gèle !
Or donc, vers minuit, je venais de redescendre dans le bateau et je regardais tranquillement une série américaine sur l'ordinateur, quand tout à coup le ciel dehors s'illumine, enfin non pas le ciel mais mon bateau, comme s'il était éclairé par un projecteur !
Dans un cas pareil, t'as le palpitant qui prend  des tours d'un seul coup et tu sautes de ta couchette pour voir ce qui se passe ... C'est ce que j'ai fait !
Je mets le nez dehors et je vois à une dizaine de mètres à l'arrière de mon bateau, un énorme projecteur qui m'aveugle, impossible de distinguer autre chose. Le projecteur se déplace, venant sur mon bâbord tout en restant derrière moi, et je finis par apercevoir une forme sombre, très sombre, genre cigarette offshore, cachée derrière le projo.
Le manège a duré je pense une ou deux minutes (dans ces cas-là la notion du temps devient très floue) avant que j'entende une voix appeler à la VHF, en anglais mais avec un accent espagnol, le bateau Hiva Oa !
C'était je pense un bateau de surveillance des côtes espagnoles, une de ces vedettes ultra-rapides peintes en noir qui circulent sans lumière pour mieux surprendre les vilains ... sauf que moi je suis un bon p'tit gars, loin d'être un vilain, du coup quand ils m'ont demandé à la VHF d'où je venais, j'ai eu un immense trou de mémoire (je venais de quitter Laxe le matin même !) et j'ai dû leur demander une minute pour avoir le temps de chercher sur la carte le nom du bled que je venais de quitter ! 
Il a fallu leur dire  aussi où j'allais, combien j'étais à bord (j'écris "combien j'étais" et pas "combien nous étions" car comme vous le savez je navigue seul ... pour l'instant) et le nom du port d'attache du bateau : quand j'ai dit "Sète" ils m'ont demandé de répéter, c'est bizarre ça, ils ne connaissent pas Sète par ici !
Voilà donc ma petite aventure nocturne, qui a eu un côté positif, celui de me démontrer le bon état (en tout cas jusqu'à présent) de mes artères coronaires et de mon muscle cardiaque ! 

Dégolfage (suite)

Deux petites vidéos à vous faire partager, évidemment prises quand le temps était maniable, car quand ça bastonne on a autre chose en tête !
Et ah oui, j'ai quand même réussi à perdre, je ne sais pas comment, deux lattes de grand-voile, et ma girouette de tête de mât s'est envolée pendant un grain ...